Quelques accidents passés


Les risques liés aux barrages semblent souvent abstraits, car il paraît inconcevable de voir un jour céder ces imposants ouvrages. Et pourtant… Retour sur trois événements passés, en France et en Italie, illustrant des cas de figure bien différents.

 

Accidents liés aux barrages dans le monde : généralités et statistiques

  • Les ruptures sont plus fréquentes sur les ouvrages en remblai que sur ceux en béton
  • La plupart des ruptures ont lieu au cours de la première mise en eau du barrage, ou  peu de temps après
  • Près d’un tiers des ruptures surviennent lors d’une crue, soit du fait de sa trop grande intensité, soit d’un dysfonctionnement des organes d’évacuation de l’eau
  • Les ruptures se font plus rares au fil des décennies, du fait certainement des progrès réalisés dans la conception, la surveillance et l’entretien des ouvrages

 

1895 : le barrage de Bouzey se rompt (Vosges, France)

Le barrage de Bouzey a été construit en 1882 en vue d’alimenter le canal des Vosges. Plusieurs fuites ont été décelées dans la digue dès sa première mise en eau. Dans les années qui suivirent, l’ouvrage a été renforcé puis rempli de nouveau, de manière plus progressive.

Mais d’autres fissures et déformations sont apparues, et des infiltrations d’eau au sein de la structure ont provoqué sa rupture le 27 avril 1895 ; la retenue contenait alors le tiers de sa capacité de stockage. 87 personnes ont trouvé la mort au cours de cet événement, qui a mis en avant l’action jusqu’alors peu connue des sous-pressions (pression exercée par l’eau à l’intérieur des fissures et des pores de la structure).

L’amélioration des connaissances à cet égard a permis des avancées en matière de construction (fixation de normes concernant la forme des barrages en maçonnerie, amélioration du drainage dans le corps des ouvrages) et entraîné le confortement de nombreux barrages existants.

 

1959 : les fondations du barrage de Malpasset cèdent (Var, France)

La construction de l’ouvrage dans la vallée du Reyran s’était achevée en 1954, mais sa mise en eau complète n’avait pu se faire pendant cinq ans. Les fortes pluies de l’automne 1959, s’accentuant fin novembre, avaient permis de remplir entièrement la retenue d’une capacité de 50 millions de m³.

Le 2 décembre 1959, le niveau d’eau était voisin de la crête du barrage et les vannes destinées à évacuer le trop plein avaient été ouvertes à 18h.

Compte tenu de la structure du sous-sol sur laquelle reposait le barrage et de ses assises rocheuses latérales où, entre autres, des failles n’avaient pas été décelées, la très forte pression des eaux souleva le barrage et le désolidarisa de son assise latérale en rive gauche. Pratiquement toute la voûte s’effaça en un instant et les 50 millions de m³ d’eau se propagèrent dans la vallée en une vague de 40 mètres de haut.

La ville de Fréjus, à une dizaine de kilomètres du barrage, a été balayée par les eaux 21 minutes après la rupture. La catastrophe a fait plus de 420 victimes (421 à 429 selon les sources), détruit 155 immeubles, sinistré 1 000 ha de terres agricoles etc. Le coût des dégâts matériels s’est élevé à 2 milliards de Francs.

C’est la plus grande catastrophe en lien avec les barrages qu’ait connue la France. A la suite de cet événement, il est apparu nécessaire de renforcer le contrôle de la sûreté des barrages grâce à un cadre législatif strict. C’est dans ce contexte que le Comité Technique Permanent des Barrages (CTPB) a été créé, en 1966, et qu’ont été réactualisées les mesures de surveillance des barrages menaçant potentiellement la sécurité publique (circulaire 70-15 du 14 août 1970).

 

            1963 : le barrage du Vajont est submergé (Vénétie, Italie)

Le grand barrage du Vajont (262 m de haut) a été construit entre 1957 et 1960 dans une gorge étroite, à 100 km au nord de Venise. En 1960, pendant sa mise en eau, un glissement de terrain s’est déclenché sur le versant en rive gauche de la retenue. Elle a été vidée afin de mener des études géologiques, qui ont finalement conclu qu’aucun phénomène dangereux n’était à craindre et que le lac pouvait être rempli.

Le 9 octobre 1963, le glissement de grande ampleur s’est soudainement accéléré : 270 millions de m³ de terre se sont engouffrés dans la retenue, provoquant le débordement des eaux à plus de 150 mètres au-dessus de la crête du barrage. Deux vagues de 25 millions de m³ chacune ont balayé plusieurs localités. Longarone, située juste en aval de l’ouvrage, a été la plus violemment touchée. Au total, près de 2 000 personnes ont perdu la vie et les dégâts matériels ont été considérables.

   
 

 
 


 

 

 

 
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