Quand donner l’alerte ?


Alerter la population alors que l’évènement redouté ne survient pas fait perdre en crédibilité, avec pour conséquence une possible absence de réaction de la population la fois suivante. A l’inverse, ne pas diffuser d’alerte lorsqu’un phénomène dangereux se produit peut avoir des conséquences catastrophiques. Mais comment savoir dans quelles conditions et à quel moment il convient d’alerter ou non la population ?

 

L’alerte ne doit être diffusée à la population que lorsque la situation constitue une menace – directe ou indirecte – pour l’intégrité des personnes, et qu’il leur est nécessaire d’adopter un comportement réflexe pour assurer leur sécurité. La notion d’urgence – ou de rapidité de réaction, est donc sous-entendue.

 

L’alerte : une mesure exceptionnelle !

L’alerte doit demeurer exceptionnelle afin d’éviter sa banalisation, auquel cas les populations n’y prêteraient plus attention. Elle ne doit donc être diffusée que lorsque l’évènement attendu est inéluctable et imminent.

Or il n’est pas toujours possible d’être certain que tel sera le cas. Il est donc d’autant plus important d’établir dans l’organisation communale de crise une montée en puissance du dispositif basée sur des phases de mise en vigilance, éventuellement de pré-alerte, puis d’alerte.

L’objectif est d’assurer un suivi aussi précis que possible de l’évolution de la situation, mais aussi d’informer la population qu’une alerte pourrait être émise, lui donnant ainsi la possibilité de prendre des dispositions pour mieux se préparer à l’arrivée du phénomène.

 


Peut-on déterminer à l’avance quand donner l’alerte ?

En dehors de scénarios de crise liée à un évènement à cinétique rapide (typiquement le cas des accidents technologiques majeurs), il n’est malheureusement pas possible de déterminer à l’avance et de manière certaine les cas de figure dans lesquels la collectivité devra ou non diffuser une alerte à sa population.

Réfléchir à la problématique de l’alerte en amont dans le cadre de la planification de la sauvegarde permet en effet de définir des critères et seuils d’alerte. Mais, s’ils apportent une aide précieuse dans l’analyse de la situation, il faut garder à l’esprit qu’il s’agit d’éléments d’aide à la décision et non de références immuables qui entraîneront systématiquement la mise en œuvre des actions envisagées.

Ainsi, la réflexion en amont aidera à se poser les bonnes questions le moment venu, mais aucun critère préétabli ne peut remplacer l’expertise humaine pour ce qui est d’effectuer les choix opportuns en fonction de la situation, en phase de vigilance puis tout au long de l’évènement.

 

Quelques critères d’aide à la décision

Pour évaluer et caractériser la menace et donc déterminer si une alerte est justifiée, il convient d’analyser la situation sous divers aspects, notamment :

  • Prévisibilité du phénomène, délais d’anticipation et cinétique de l’évènement

Pour être utile, l’alerte doit être diffusée avant que l’évènement ne produise ses effets. Elle est donc inexistante en cas d’évènement subi, sauf s’il y a des effets différés dans l’espace et /ou dans le temps : par exemple une explosion soudaine sur une installation industrielle est subie et ne permet donc pas l’alerte de la population locale, mais le déplacement d’un nuage toxique devra nécessiter l’alerte des populations situées sur son passage.

Si l’évènement peut être anticipé, il faut s’interroger sur les délais (est-il imminent ou attendu à plus longue échéance ?), sa vitesse de propagation et la durée de ses effets : « l’aléa est-il suffisamment soudain pour justifier l’adoption d’un comportement réflexe ? Autrement dit : l'événement autorise-t-il une plus grande anticipation conduisant à une mise en sécurité organisée bien avant sa réalisation ? [Par ailleurs,] l'aléa est-il d'une durée justifiant l'adoption d'un comportement réflexe ? » (DGSCGC, Ministère de l’Intérieur).

Par exemple, une pandémie grippale durable mais attendue plusieurs mois à l’avance nécessitera l’adoption de comportements non pas réflexes mais s’inscrivant dans la durée : la situation rendra donc indispensable une large information de la population mais ne justifiera pas une alerte. A l’inverse, un accident sur une Installation Nucléaire de Base (INB) générant un risque d’irradiation des personnes, même sur une courte durée (par exemple en cas de vent fort dispersant rapidement les masses d’air radioactives), doit impérativement faire l’objet d’une alerte pour que la population se mette au plus vite en sécurité.

  • Intensité du phénomène

Il s’agit d’estimer sa gravité et l’ampleur de ses effets. Ces éléments devront ensuite être croisés avec les enjeux (voir ci-après) pour déterminer les conséquences possibles de l’évènement. L’alerte ne doit être donnée que si la menace est lourde : s’il y a peu d’enjeux exposés ou que les effets ne porteront pas atteinte à l’intégrité des personnes, il conviendra de procéder uniquement à une information ou une mise en vigilance des populations concernées.

  • Quantité d’enjeux exposés

L’alerte est réservée aux évènements pouvant affecter la collectivité, c’est-à-dire un public nombreux. Si par exemple seules deux habitations sont concernées par un risque d’inondation imminente, la collectivité procédera simplement à l’information et à l’évacuation de leurs occupants. Si en revanche tout un quartier est concerné, l’alerte doit être diffusée, mais ciblée aux seuls habitants du secteur concerné : la population non exposée ne doit pas faire l’objet d’une alerte mais d’une information.

  • Vulnérabilité des enjeux exposés

L’objectif est d’apprécier le risque d’atteinte à l’intégrité physique des personnes selon les diverses caractéristiques des enjeux exposés, notamment :

    • leur quantité et leur densité : il existe par exemple plus de risques d’effet de foule ou de suraccident en ville qu’à la campagne ; les effets d’un même phénomène – et donc la menace qu’il constitue – ne seront pas les mêmes dans un petit village que dans une grande agglomération,
    • leur connaissance locale des risques et des consignes de sécurité, et donc leur capacité à réagir ou non de manière appropriée pour éviter de s’exposer au danger : à cet égard, une attention particulière doit être portée aux Etablissements Recevant du Public (ERP) et aux populations touristiques,
    • leur fragilité, liée à leur degré d’autonomie : des enfants, des personnes âgées ou encore les patients d’une clinique ne pourront par exemple assurer seuls leur mise en sécurité et devront faire l’objet d’une prise en charge particulière.

Après prise en compte de ces différents aspects, l’alerte s’avère dans de nombreux cas injustifiée, mais une information de toute ou partie de la population peut toutefois s’avérer nécessaire.

   
 

 
 


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