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Les Rendez-vous majeurs deviennent le nouvel espace pour débattre des enjeux de la prévention des risques industriels

Publié le 12 avril 2021

Par Delphine FAVRE

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Les Rendez-vous majeurs deviennent le nouvel espace pour débattre des enjeux de la prévention des risques industriels

Le 20 mai 2021 se déroulera la première édition des Rendez-vous majeurs, le nouvel événement des risques technologiques en France, au format 100% numérique. Organisé par l’association Amaris, avec l’appui de l’INERIS et le soutien du Ministère de la transition écologique, il permettra aux acteurs du secteur de se rencontrer et d’échanger sur des thématiques en phase avec les enjeux actuels de la prévention et la gestion des risques. Dans ce cadre, l’Institut des Risques Majeurs (IRMa) co-organise le débat [T6 - Gestion de crise] - PPI, PCS, PFMS, PPMS, Comment sortir du « chacun son plan » ? En amont de cet échange, et comme un avant-goût, voici les grandes lignes des éléments qui seront abordés lors du débat. Propos recueillis par Delphine Favre auprès de François Giannoccaro, directeur de l’IRMa.

 

François Giannoccaro

En cas d’accident industriel, la gestion de crise repose en matière de sécurité civile sur le dispositif ORSEC-PPI, organisé autour du préfet, de l’industriel et des maires. Ce dispositif est-il dépassé au regard de l’accident de Lubrizol ?

François Giannoccaro : L’incendie de l’usine Lubrizol à Rouen le 26 septembre 2019 a mis une nouvelle fois en évidence le rôle primordial des acteurs de l’échelon territorial dans la gestion d’une situation de crise, en appui à la réponse verticale des secours, dite réponse ORSEC. Ce dispositif fonctionne bien, quand les acteurs sont correctement préparés, notamment grâce à des Plans Communaux de Sauvegarde (PCS) adaptés aux risques et réellement opérationnels.
 
La réponse des secours s’est faite sous la direction du préfet au regard de l’ampleur exceptionnelle de l’incendie. Cela étant, la coordination territoriale des opérations d’information et de sauvegarde a laissé apparaitre un certain nombre de dysfonctionnements. Plusieurs maires des communes proches du sinistre ont notamment été informés tardivement de la situation. Des acteurs du terrain qui ont perçu l’accident directement n’ont pas été mobilisés alors qu’ils auraient pu jouer un rôle important.

Il faut cependant garder à l’esprit que lorsque la dernière grande loi sur le sujet a été promulguée en 2004 , les intercommunalités n’avaient pas les mêmes responsabilités qu’aujourd’hui et peu d’acteurs se posaient la question de la manière d’impliquer, par exemple, les établissements recevant du public (ERP) ou encore les entreprises en zone à risques, dans la gestion de la crise. Le dispositif de planification n’est donc pas dépassé, mais il doit considérer le rôle opérationnel d’acteurs multiples et des outils puissants d’information, parfois difficilement contrôlables et qui peuvent générer rumeurs et désinformation, en l’occurrence les réseaux sociaux.

Comment peut-on mieux impliquer et coordonner tous ces acteurs ?

François Giannoccaro : Aujourd’hui en matière de gestion administrative des risques, la commune doit établir son Plan Communal de Sauvegarde (PCS) et les établissements scolaires leur Plan Particulier de Mise en Sûreté (PPMS), le citoyen est censé avoir réaliser son Plan Familial de Mise en Sûreté (PFMS), et nous incitons l’ensemble des ERP à établir leur Plan d’organisation et de Mise en Sûreté (POMSE). Cela fait beaucoup de sigle et cela peut paraître abscons mais cela montre que chacun a un rôle à jouer et que rien ne pourra fonctionner parfaitement si un acteur vulnérable ne s’est pas préparé. C’est tout l’enjeu des actions de sensibilisation, de formation et d’entrainement à la gestion de crise que l’IRMa, et quelques autres acteurs, mènent sur le terrain. Mais il n’y a pas de recette miracle, cela demande du temps et des moyens ! Il faut rencontrer les responsables et décideurs locaux publics et privés, convaincre de la réalité des risques, travailler sur les procédures, mettre en place les outils adaptés (d’information et d’alerte, d’aide à la décision dans un contexte de coordination interservices), apprendre à s’en servir et cela, à l’échelle de l’ensemble du bassin de vie où l’événement (ou la catastrophe) peut être perçu. On ne doit pas se limiter aux zones directement impactées par l’accident industriel.

Les communes ont bien sûr un rôle central à jouer dans l’implication et la coordination des acteurs de la crise sur leur territoire. L’IRMa les assiste dans ce sens depuis des années. Lorsque nous organisons des exercices, nous encourageons les maires à « faire jouer » les écoles par exemple ou à impliquer les habitants d’un quartier ou encore les entreprises privées. Nous les encourageons aussi à bien identifier l’ensemble des acteurs vulnérables, les informer et les faire monter en compétence en amont de l’exercice.

Les maires ne sont cependant plus seuls aujourd’hui à devoir se préparer à l’événement dommageable. Nous devons réfléchir à la place et au rôle des intercommunalités dans la gestion de crise et de certains autres acteurs, comme les entreprises en zone à risque ou encore les ERP. Nous avons lancé cette réflexion à l’IRMa il y a plus de 10 ans maintenant et de nombreuses communautés de communes, syndicats de rivières ou métropoles se sont emparés du sujet depuis.

À travers son emprise territoriale plus large, les moyens techniques et fonctionnels dont elle dispose et la prise de recul qu’elle rend possible, l’intercommunalité peut venir appuyer utilement les pouvoirs de police qui relèvent du maire et du préfet, sans les remettre en cause. Il existe un vrai enjeu aujourd’hui autour de la mise en place et de la généralisation d’une coopération intercommunale planifiée en matière de gestion de crise impliquant les intercommunalités mais pas seulement.

Comment mieux préparer les habitants à la gestion de crise ?

François Giannoccaro : Pour l’IRMa, le public est aujourd’hui le grand absent des politiques de prévention des risques. Les administrés ne se mobiliseront qu’occasionnellement et bien souvent soit, après une catastrophe en tant que « sinistrés » soit, sur des positions « défensives » pour s’opposer à la dévalorisation des biens fonciers exposés dans les zones à risques. L’implication réelle et en amont du citoyen et des acteurs locaux dans la gestion intégrée des risques nous apparait indispensable.

Lors de l’accident de Lubrizol, les craintes légitimes du préfet, par rapport à la faible connaissance des consignes de comportement à adopter en cas d’alerte des populations dans la zone concernée par le Plan Particulier d’Intervention (PPI), mettent en exergue la nécessité absolue de mieux préparer les populations à faire face à un accident industriel. Parallèlement, il importe aussi de réfléchir aux meilleures technologies permettant de rendre efficace l’information et l’alerte en zone accidentelle, mais également dans les secteurs plus éloignés où la population n’est pas directement menacée mais où la catastrophe est perçue malgré tout.

Convaincre de la réalité des risques est compliqué, imaginer la catastrophe et les différents scénarios possibles n’est naturel pour personne. Il faut se projeter dans un temps hors du temps au cours duquel on s’imagine tout perdre et cela n’est pas facile. Nous sommes confrontés à cela tous les jours dans nos métiers, mais les choses avancent malgré tout, croyez-moi. Selon notre Institut, l’un des outils encore trop peu utilisé est l’implication des habitants et des acteurs locaux dans les exercices de sécurité civile organisés à l’initiative des maires. Ces exercices doivent devenir un moyen d’information, de mobilisation et de responsabilisation des acteurs les plus vulnérables jusqu’au grand public.

En savoir plus :

> Les "Rendez-vous majeurs" :
https://www.rendezvousmajeurs.com/



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