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Gestion collective de la crise en cas d’avalanche

Publié le 20 janvier 2021

Par Aurélie Peillon

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Gestion collective de la crise en cas d’avalanche
Exercice de secours d'avalanche, 2015 © Thierry Jouve

Comment les acteurs responsables de la sécurité dans les stations de ski (i) réduisent le risque et (ii) gèrent la situation d’avalanche si celle-ci devait survenir ? En mettant en avant des éléments qui seraient défaillants, il s'agit également de proposer une solution numérique en soutient à ce travail collectivement réalisé.


Ma thèse de doctorat a débuté en septembre 2018 pour 3 ans à l’Université Grenoble Alpes dans le cadre du projet interdisciplinaire RISK@UGA (http://risk.univ-grenoble-alpes.fr) financée par les Initiatives d’Excellence de l’Agence Nationale de la Recherche, dans le Programme d’Investissements d’Avenir.

Je suis psychologue du travail depuis 2016. Pendant ma formation, j’ai travaillé deux années auprès des sapeurs-pompiers de la Loire en tant que psychologue. Cette expérience m’a intéressée à comprendre le fonctionnement humain en gestion de crise, jusqu’à postuler à ce sujet de thèse.

Première année de thèse

Lors de la première année, 25 entretiens ont été réalisés auprès d’acteurs impliqués dans le risque d’avalanche : secouristes de haute montagne, stations de ski, structures de recherche et associations de sensibilisation, préfectures, maires, prévisionnistes météo. Ces entretiens ont permis de caractériser les acteurs concernés par ce risque naturel ainsi que de mettre en avant les différents dommages possibles (pratiquants de la montagne, bâtiments, routes). Les procédures, les modalités de transmission des informations et les outils de communication ont été aussi étudiés afin d’avoir une compréhension globale de la gestion de ce risque. A la fin de la première année, le sujet de la thèse a été centré sur les stations de ski car elles cumulent plusieurs points de difficultés (la gestion des médias par exemple). La station permet aussi de contrôler certaines variables par rapport au domaine de la haute montagne et facilite l’accès aux données de terrain.

Deuxième année de thèse

La deuxième année de thèse s’est principalement composée d’observations en stations de ski. Les observations sur le terrain se justifient car les études en ergonomie se réalisent au plus près des acteurs concernés par le sujet. Concrètement, il s’agit d’aller observer le travail réellement effectué par les acteurs en charge de la sécurité du domaine skiable. Deux stations de ski ont accepté d’être observées sur une durée d’un mois et demi chacune lors de l’hiver 2019-2020.


Exercice de secours d'avalanche, janvier 2020  © Aurélie Peillon

Un exercice préfectoral d’avalanche a également été réalisé sur la station de l’Alpe d’Huez le 30 janvier 2020. L’objectif de cette simulation était la coordination interservices entre les sapeurs-pompiers, la CRS Alpes et le SAMU. Des enregistrements vidéo ont été réalisés pour garder une trace des actions réalisées par les acteurs : l’observable des activités. Nous avons ensuite montré aux acteurs leur activité via des extraits de films, pour leur poser des questions sur les raisonnements qu’ils avaient à ce moment-là. Cette méthode nous permet d’accéder à l’inobservable des acteurs : les informations qu’ils avaient, celles qu’ils souhaitent obtenir, les réflexions qu’ils pouvaient se faire, etc.

Objectifs et apports

Comprendre comment les acteurs concernés se coordonnent pour atteindre des buts communs de prévention et de gestion des secours

Ma thèse a deux objectifs principaux :

  1. Augmenter les connaissances concernant le travail collectif pour la prévention et la gestion des avalanches en station de ski : Ce premier objectif ambitionne aussi de mettre en lumière les dysfonctionnements possibles, par exemple du fait de représentation différentes d’une même situation ou de difficultés liées au partage d’informations.

  2. Aider les acteurs à anticiper et gérer ces situations, notamment par un logiciel qui viendrait capitaliser en temps réel les différentes informations nécessaires à l’estimation du risque d’avalanche ou la gestion de la situation d’avalanche. Ces informations pourraient être facilement transmises à l’ensemble des acteurs impliqués et concerner par exemple la météorologie, la nivologie, les ressources humaines et matérielles disponibles…

Exercice de secours d'avalanche, 2015  © Thierry Jouve

Premiers résultats

Une situation d’avalanche peut comporter des « points de basculement » amenant à une véritable situation de crise (par exemple de nombreuses victimes ou un manque de ressources)
  • Les différentes représentations de la crise

Les analyses des entretiens ont mis en avant qu’en fonction des acteurs interrogés, la situation d’avalanche peut être considérée comme une crise, ou pas. Cette différence s’explique car une situation d’avalanche peut comporter des « points de basculement » amenant à une véritable situation de crise (par exemple de nombreuses victimes ou un manque de ressources). Au-delà des caractéristiques de la situation, les activités réalisées et la position de responsabilité influencent elles aussi la perception de la situation comme crise ou non.

  • La simulation d’avalanche

Les activités de management des différentes entités présentes (CRS, SDIS) ont été la principale source d’intérêt de l’exercice préfectoral. Ces activités se concentrent sur l’anticipation des évolutions possibles de la situation et le besoin d’avoir une représentation claire de la situation actuelle (ex : nombre exact de victimes). Les interactions entre le commandant et le commandant adjoint ont été étudiées, pour chaque entité, pour comprendre comment la répartition des tâches se réalise et comment les informations sont transmises.

Perspectives et attentes

Les différentes modalités de coopération entre les acteurs sont étudiées afin de rendre compte des éléments qui favorisent ou limitent l’efficacité d’un secours.

A l’heure actuelle, les données récoltées dans les deux stations de ski au travers d’enregistrements audios, des entretiens, des documents de travail sont analysées. L’attention est mise sur les communications échangées entre les acteurs. Ces échanges, réalisés principalement par radio, montrent quelles sont les informations importantes échangées entre les acteurs en présence lors de la sécurisation mais aussi de la gestion d’une situation d’avalanche. Les enregistrements vidéo ainsi que les auto-confrontations réalisées avec les acteurs lors de l’exercice d’avalanche doivent encore être analysés pour mettre en avant les processus de travail collectif à l’œuvre dans la gestion de cette situation. De plus, grâce aux différents entretiens réalisés post-exercice, les processus cognitifs en charge de la construction d’une représentation de la situation juste seront mis en avant. Ceci permettra de créer un outil soutenant les activités de supervision des situations d’avalanche pertinent en fonction des informations jugées prioritaires par les acteurs concernés. La coopération entre les acteurs sera alors facilitée par une meilleure diffusion des informations.

 

Encadrements :
CAROLY Sandrine, Professeure en Ergonomie, laboratoire PACTE, Université Grenoble Alpes
LAURILLAU Yann, Maitre de Conférence en Informatique, laboratoire LIG, Université Grenoble Alpes
RICHARD Didier, Ingénieur-chercheur, INRAE

 

Le Cross Disciplinary Project Risk (CDP Risk) de l'Université de Grenoble Alpes est un des dix-huit projets d'une Initiative d'Excellence financée par l'Etat à Grenoble pour favoriser l'émergence de recherches pluridisciplinaires dans différents domaines. Depuis 2018, le CDP Risk rassemble plusieurs laboratoires grenoblois impliqués dans des projets transversaux pour répondre à des problèmes sociétaux d'analyse, de prévention des risques et de gestion de crise, tant par des approches issues des sciences humaines et sociales que par des méthodologies issues des géosciences, de l'ingénierie et des sciences de l'information. Le CDP RISK finance onze thèses co-dirigées au sein de laboratoires complémentaires pour initier la science du risque de demain autour des risques naturels et de leur impact sur la société. A terme, un Institut des Risques doit voir le jour à Grenoble avec la perspective de développer et valoriser la recherche et la formation autour des risques auprès d'acteurs institutionnels et privés. Dans cet esprit, 7 doctorants ont accepté de partager sur le site Web de l'IRMa leurs premiers résultats de thèse. Une saga en 7 épisodes, à retrouver ici chaque semaine !

  risk.univ-grenoble-alpes.fr
https://twitter.com/Risk_UGA @Risk_UGA



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