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Comment généraliser les Plans Communaux de Sauvegarde (PCS) en France ?

Publié le 8 octobre 2013

Par François Giannoccaro

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Comment généraliser les Plans Communaux de Sauvegarde (PCS) en France ?
Photo de gauche à droite : Luc DUPRIEZ (DGSCGC - Ministère de l'Intérieur) et Henri de Choudens (IRMa)

Au regard de son retour d’expérience en Rhône-Alpes, l'IRMa a été consulté pour contribuer à la réflexion engagée par l'Administration pour évaluer les moyens propres à généraliser les Plans Communaux de Sauvegarde (PCS) en France dans les communes qui ont des obligations en la matière. Au cours d’une visite dans ses locaux, l’Institut a été amené à cet égard à formuler plusieurs propositions auprès de Luc DUPRIEZ, Sous-préfet chargé de mission auprès de la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) du Ministère de l’Intérieur.

 

C’est au cours d’un déplacement dans ses locaux à Grenoble le mardi 8 octobre 2013 que l’IRMa a reçu Luc DUPRIEZ, Sous-préfet chargé de mission auprès de la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) du Ministère de l’Intérieur pour évaluer les moyens propres à généraliser les Plan Communaux de Sauvegarde (PCS) en France dans les communes qui ont des obligations en la matière.

Plusieurs objectifs guident le Sous-préfet dans cette réflexion, notamment de pouvoir :

- évaluer le niveau d’efficacité du dispositif législatif et réglementaire en matière de planification de la sauvegarde au niveau communal et sa mise en œuvre opérationnelle sur le terrain

- au regard du taux de généralisation des PCS, discerner les dysfonctionnements du dispositif actuel ainsi que les raisons associées et les moyens pouvant raisonnablement être mis en œuvre pour y remédier

- identifier les pistes à explorer pour améliorer le niveau de responsabilisation des décideurs locaux dans la mise en place des PCS et le maintien dans le temps de leur caractère opérationnel

En bref

Promouvoir un référentiel culturel collectif sur les risques majeurs au niveau local passe nécessairement par une pérennisation dans le temps d’une série d’actions de responsabilisation et de préparation des responsables/décideurs locaux et des populations à faire face aux situations de crise (sensibilisation, information, éducation, formation, exercices, entrainements…).

La réglementation confère in fine aux maires la mission de planification de la sauvegarde, à travers notamment la mise en place du Plan Communal de Sauvegarde (PCS). De manière évidente les constats de notre Institut sur le terrain font apparaitre qu’ils n’ont pas, pour la plupart, les moyens d’assurer efficacement cette mission. Or, il est nécessaire de renforcer les mesures d’accompagnement des maires en la matière, en particulier pour les petites communes

Situation générale

Les événements de la Vendée (Xynthia) et du Var de juin 2010 mais également plus récemment les inondations de juin 2012 dans les Pyrénées ont mis en exergue encore une fois les difficultés pour les maires de gérer de telles situations de crise au niveau communal : anticipation des menaces existant sur leur territoire, appréciation de l’ampleur des vulnérabilités exposées, mise en œuvre des dispositifs d’alerte et d’information des populations, communication de crise…

Pour remédier à cette situation, la loi n°2004–811 du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile est venue réaffirmer le rôle primordial de l’échelon communal dans la gestion d’une situation de crise, qu’elle soit d’origine naturelle ou technologique, en demandant aux maires de se préparer à de telles situations en réalisant leur PCS.

L’article 13 de cette loi repris dans le code de la sécurité intérieure (L 731 – 3) précise que le PCS est obligatoire dans les communes « …dotées d’un Plan de Prévention des Risques Naturels prévisibles (PPR) approuvé ou comprise dans le champ d’application d’un Plan Particulier d’Intervention (PPI)… ».

Au total, plus de 12 000 communes en France sont réglementairement concernées par l’élaboration d’un PCS. Or, selon des sources de la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) du Ministère en charge de l’Intérieur de mars 2012, moins de 50 % (45.7 %) des PCS réglementaires ont été réalisés depuis 2005, date de la création de son décret d’application.

Le cas rhônalpin

La région Rhône-Alpes fait bonne figure avec un taux de généralisation des PCS en 2013 de 69.7 % ([i]) sans compter les communes qui l’ont réalisé sans obligation (cf. ci-dessous le lien vers le fichier présentant l’état de généralisation des PCS réglementaires par département en Rhône-Alpes et la carte régionale associée).

Plusieurs raisons peuvent expliquer ces chiffres encourageants dans cette région. Outre la forte implication des services préfectoraux en charge de ces questions, on peut penser également que les formations départementales à l’échelle de l’arrondissement, à destination des responsables et décideurs locaux assurées sur le sujet par l’IRMa de 2008 à 2011, avec les soutiens du Conseil régional Rhône-Alpes, du Conseil général de l’Isère pour l’Isère et de l’Etat (DREAL Rhône-Alpes) ont contribué à ce résultat.  

En effet durant cette période, pas moins de 2 940 élus et responsables de collectivités ont participé à l’une des 58 sessions d’information (pour plus de 300 heures de formation dispensées) sur le thème de la planification de la sauvegarde au niveau local et de l’information préventive des populations associée.

Ces sessions, portées par l’IRMa dans leur mise en œuvre, ont systématiquement associé les fédérations ou associations départementales des maires ainsi que les préfectures de département dans un partenariat apprécié par les élus locaux.

Pour beaucoup d’entre elles, les communes qui sont venues à ces formations et qui ont mis en place leur PCS en Rhône-Alpes, ont pris conscience du fait qu’une fois son élaboration aboutie, il reste un travail essentiel à mener sur le long terme pour garantir le maintien opérationnel du dispositif et le niveau d’appropriation des acteurs locaux. Les exercices et la formation des acteurs associés sont les clés de voûte de ce processus en permettant la mise en œuvre pratique des dispositions prévues dans le PCS par une simulation d’évènements réels.

 

Les constats relevés par notre Institut dans la mise en place des PCS, sur leur niveau opérationnel et sur l’état de généralisation (non exhaustif)

- Une incompréhension des objectifs de la doctrine nationale de mise en place du PCS qui nécessite l’engagement d’une véritable démarche de participation et de responsabilisation locale à tous les niveaux : élus, personnel communal, acteurs locaux jusqu’aux citoyens. La finalité documentaire est insuffisante.

- La chaîne de la mise en vigilance et de l’alerte insuffisamment formalisée

- Une planification de l’évacuation préventive hasardeuse ou non réfléchie

- Une absence d’exercices réguliers

- Pas d’outils d’évaluation ou d’audit des PCS réalisés

- Pas ou peu de mises à jour des PCS existants 

- Une quasi absence de retour d’expérience au niveau communal ne favorisant pas la capitalisation des enseignements ex/post

- Peu d’outils destinés à mieux gérer la post-catastrophe (continuité d’activité du service public par exemple)

- Peu d’actions de responsabilisation à l’échelle « infracommunale » favorisant l’implication civile et citoyenne en soutien aux actions de sauvegarde communale du maire (comme les Plan Particuliers de Mise en Sureté (PPMS) au niveau des établissements scolaires, les réserves communales de sécurité civile (RCSC), les Plans d’Organisation et de Mise en Sûreté dans les entreprises (POMSE…)

- Une prise en compte insuffisante de la problématique de la gestion de la crise au niveau local dans les programmes d'actions de prévention contre les inondations (PAPI)

- Une implication insuffisante de certains services déconcentrés de l’Etat sur ce thème qui mériterait une approche plus interministérielle au niveau des territoires

 

Quelques propositions de notre Institut pour améliorer la situation (non exhaustif) :

En termes de contenu des PCS

Sur la nature de l’information et son format (le traitement des données disponibles conditionne la préparation de la compréhension par les autorités locales des informations opérationnelles dispensées pendant le déroulement d'un évènement, notamment en matière de mise en vigilance et d'alerte)

- Dans les PCS, améliorer la caractérisation des aléas à prendre en compte (dont aléas extrêmes) et mieux définir les « seuils de déclenchement (appréciation des seuils critiques)» pour le déclenchement des mesures prévues 

- Clarifier les concepts de vigilance et d’alerte. En effet, les confusions sémantiques sont récurrentes notamment dans l’utilisation des termes de « vigilance » et « d’alerte », confusion de commodité souvent relayée par les médias

- Face aux risques à cinétique rapide, développer de véritables systèmes d’avertissement des autorités locales et des populations privilégiant des circuits courts, utilisant notamment les technologies de l’information et de la communication

- Définir clairement les conseils de comportement « en mode réflexe » à diffuser auprès des populations au regard du niveau de risque (appréciation des seuils critiques) et de la cinétique de l’événement

- Définir clairement le rôle des Médias Sociaux en Situation d’Urgence (MSGU) pour traiter et relayer l’information en temps réels et préparer les acteurs à utiliser ces médias (Cf les recommandations du Bureau régional de la gestion d’urgence de Wellington - Nouvelle-Zélande - 2012). Se pose la question de l’implication civile et citoyenne en la matière.

- Pour les Installations industrielles, cadrer l’information des populations et des autorité locales en cas d’incident perceptible de l’extérieur ou d’évènement incommodant, hors contexte PPI

 

En termes de démarche (non exhaustif)

- Généraliser l'obligation d'établir des PCS dans toutes les communes où le risque ne peut être exclu (également hors procédure PPR) 

- Généraliser les formations sur la mise en place opérationnelle des PCS auprès des responsables et décideurs locaux 

- Préparer et inciter le secteur marchand à formuler des offres de services PCS auprès des communes qui consultent dans le respect de la doctrine nationale édictée par la DGSCGC – Ministère de l’Intérieur

- Développer des outils d’évaluation des PCS : auditer ou faire auditer périodiquement les outils du PCS pour :
o Evaluer le niveau de conformité de la réalisation du PCS au regard de la doctrine nationale
o Evaluer les « niveaux d’appropriation » et le caractère opérationnel des dispositifs mis en place
o Analyser la « robustesse » de l’organisation (manque d’outils, travaux de recherche nécessaires)

- Développer des outils d’évaluation de l’impact des actions d’information préventive réalisées par les communes et de l’évolution dans le temps de la connaissance de ces informations auprès des populations (démarche DICRIM de la responsabilité des maires)

- Promouvoir une politique de généralisation des exercices de simulation à l’initiative des communes 

- Développer des outils destinés à mieux gérer la post-catastrophe (Plans Post-catastrophe : problématique ; qui fait quoi ? comment ? avec quels moyens ?) 

 

Du point de vue stratégique (non exhaustif)

 - Au regard de certaines bonnes pratiques constatées sur le territoire national, encourager les Intercommunalités, les Départements et les Régions à engager des actions volontaristes en matière de développement d’une culture du risque et de soutiens aux collectivités (et les rendre légitimes)

- Favoriser sur le territoire national l’émergence ou la consolidation de centres de ressources régionalisés permanents chargés de la promotion et de la mise en œuvre de la culture du risque auprès des responsables et décideurs locaux tels que le CYPRES de Martigues, le C-Prim de Lourdes ou encore de l’IRMa en Rhône-Alpes

- Rendre exigible au fond de prévention des risques naturels majeurs les actions de promotion d’une culture du risque initiées par les centres de ressources permanents évoqués dans le point précédent (selon des modalités de financement et des cadres partenariaux locaux qui restent à définir)

- Dès le début de leur  mandat et tout au long de ce dernier, développer la formation des élus visant à renforcer la préparation aux situations de crise

- Favoriser l’implication civile et citoyenne dans les dispositifs de sécurité civile au niveau local et fournir les moyens nécessaires à la promotion de ces dispositifs (RCSC, relais de quartiers, vigies humaines…)



[i] Source : Préfectures  de  département en Rhône-Alpes

 

En savoir plus :

> Plus d'information sur le Plan Communal de Sauvegadre (PCS), le dossier thématique multimédia de l'IRMa
http://www.irma-grenoble.com/05documentation/04dossiers_numero.php?id_DT=3

> Accéder au guide SMAL Assurances/IRMa "Plan Communal de Sauvegarde (PCS) - Garantir son caractère opérationnel"
http://www.irma-grenoble.com/PDF/05documentation/brochure/Guide_PCS_SMACL_IRMa.pdf


Télécharger :

> Etat de généralisation des PCS réglementaires par département en Rhône-Alpes
/PDF/actualite/articles/Tableau_PCS_2013_RhoneAlpes.pdf

> Carte régionale sur l'état de généralisation des PCS réglementaires en Rhône-Alpes
/PDF/actualite/articles/Carte_avancement_PCS_RA.jpg



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