Politiques publiques | Mouvement de terrain
Le Néron, parfois appelé Casque du Néron en raison de sa forme rappelant celle qu'un casque romain, est une montagne du massif de la Chartreuse culminant à 1298 mètres. Et voilà qu’aujourd’hui, on reparle de lui après la canicule d’août 2003 qui avait occasionné sur ce massif des incendies ininterrompus sur plusieurs semaines. Depuis quelques jours, une activité soutenue a été détectée sur une colonne de pierre de 60 mètres de haut et 10 mètres d’épaisseur qui, selon le cabinet d’étude SAGE, ferait 15 000 tonnes, soit environ 6000 mètres cubes. Le point délicat, c’est que cette instabilité rocheuse menace le hameau habité dit de Ripaillère.
L’instabilité est connue depuis un certain temps. La colonne rocheuse a été instrumentée pour surveiller l’évolution du phénomène… qui s’est accéléré ces derniers jours. Interrogé par l’Institut, Monsieur Tudela, Directeur des services techniques de la ville de Saint Martin le Vinoux, revient sur l’évolution du phénomène.
Mise en place en août 2006, la surveillance du site a été développée pour reconnaître les contours précis et le détail de la cinématique de la zone en mouvement. Elle comporte aujourd’hui 4 systèmes de capteurs extensométriques dont les valeurs relevées automatiquement par une centrale sur zone sont transmises directement auprès du cabinet d’étude SAGE avec un suivi 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24. Il a été constaté de l’ordre de 6 mn de mouvement en 6 mois sur les instruments. C’est au début du mois de mars que l’accélération du phénomène s’est fait ressentir avec 1,5 mn sur une seule semaine.
Et des sirènes ont été mises en place tout récemment ainsi qu’une procédure d’urgence. Elles sont opérationnelles et prêtes à retentir au cas ou…
Selon Monsieur Tudela, le dispositif vient d’être récemment consolidé par un système d’alerte composé de 2 sirènes qui permettent de générer des alarmes en temps réel, en cas de dépassement des seuils prédéfinis (soit environ 10 mn pour que les sirènes se déclenchent). Le plan communal de sauvegarde (PCS) pourra ainsi être déclenché en même temps que les habitants de Ripaillère évacuent le hameau par leurs propres moyens pour rejoindre le point de regroupement préalablement établi (Le hameau de Ripaillère comprend 23 habitations : 42 adultes et 23 enfants).
Une protection passive de type « merlon » va être mise en chantier dans les meilleurs délais
A partir de calculs de trajectographie, qui estiment la propagation des blocs en cas de chute et précisent l’étendue et la forme que pourra prendre la zone de dépôt de l’éboulement, un merlon de protection, long de 250 mètres et de 9 mètres de haut de sa base, sera construit en amont du hameau de Ripaillère pour le mettre en sécurité. Le chantier devrait commencer le 16 avril et se terminer en 2 ou 3 mois.
Face à un danger éventuel, mieux vaut prévenir, informer et faire prendre conscience
A l’initiative du Maire, Monsieur Ollivier, qui ne voulait rien cacher à ses habitants, plusieurs réunions ont eu lieu dont une session extraordinaire du Conseil municipal, le 20 mars dernier en présence des décideurs et responsables locaux. Les habitants du hameau se sont même regroupés en association, à la demande de la mairie. Néanmoins, de nombreuses questions restent en suspens : la colonne finira-t-elle par tomber ? Si oui, quand ? Et comment ?
Le Dauphiné Libéré du 2 avril faisait état du niveau d’inquiétude des habitants du hameau de Ripaillère. Interviewé, Monsieur Dumas, Président de la jeune association des riverains, soulignait « C’est vrai que certaines personnes, dont les propriétés sont plus exposées, ont un peu peur. Une dame a notamment renoncé à garder ses petits enfants pour pâques. Mais ce n’est pas l’affolement général. Car ici à Ripaillère, les chutes de pierres ont toujours fait partie intégrante du paysage et de l’histoire du pays. On sait par exemple que tel ou tel bloc est tombé un beau jour de 1949 ou de 1956. Et on a même baptisé une parcelle de terre : le champ des rochers. Alors… les plus anciens, sont habitués aux mouvements du Néron. Ils sont moins craintifs que les nouveaux ».
Et dans la foulée, le système d’alerte fait des siennes…avec une vrai « fausse » alarme dans la nuit du 1 avril !
Alors qu’une certaine tension est perceptible auprès des habitants du hameau, c’est le jeune système d’alerte qui se met à être défaillant en pleine nuit. Il est 4 h 30 du matin (selon les habitants) dans la nuit du 1 avril quand les sirènes retentissent pendant près d’une heure avant qu’elles ne soient désactivées volontairement par les services municipaux, eux mêmes avertis par un représentant de la nouvelle association des habitants de Ripaillère. Une vingtaine d’habitants du hameau se sont réveillés et ont rejoint à pied le point de regroupement alors que d’autres dans leur sommeil n’avaient rien entendu. De cet exercice inopiné qui n’en était pas un, plusieurs enseignements ont toutefois été relevés par les services techniques de la mairie. En particulier, le fait que les sirènes n’ont pas été entendues par l’ensemble des riverains. Des modes complémentaires de diffusion de l’alerte devraient peut être voir le jour dans les semaines qui viennent selon les services techniques.
Les éboulements en masse, un risque méconnu
Des progrès réguliers ont été réalisés ces dernières années pour tenter de mieux connaître les phénomènes d’éboulements en masse (de quelques centaines à quelques milliers de mètres cubes), en particulier dans la région grenobloise (cf les travaux menés par le syndicat mixte pour l’élaboration et le suivi du schéma directeur de la région grenobloise). Mais c’est encore insuffisant à ce jour. L’enjeu actuel est tripe :
Les enjeux
La connaissance des phénomènes et de leur impact potentiel sur le territoire reste à ce jour insuffisante pour les grands éboulements. Le panorama établis par les premières études dans l’agglomération grenobloise a besoin d’être précisé. En particulier, il est nécessaire d’améliorer encore la méthode utilisée pour hiérarchiser, selon leur dangerosité, les compartiments de falaise déjà identifiés. En même temps, il est nécessaire d’avancer dans la définition des périmètres exposés (études de propagation adaptées).
Pour les zones qui seront identifiées comme étant à « risque élevé », la maitrise de l’urbanisation, associée à la mise en place d’un réseau de surveillance, restera le seul outil de prévention. Dans ce cas, le schéma directeur ou le schéma de cohérence territorial (SCOT), les plans locaux d’urbanisme (PLU), pourront, dans le prolongement des PPR (plans de prévention des risques naturels prévisibles), soit interdire la constructibilité, soit la conditionner à des modes restrictifs d’utilisation des sols.
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