Politiques publiques | Crue / Inondation
Les Français ne sont pas suffisamment informés sur les risques majeurs et notamment sur le risque inondation. Les événements dommageables qui se sont produits en Vendée mais plus récemment dans le Var remettent à l'ordre du jour la réglementation qui impose aux maires de sensibiliser les populations à la notion de risque majeur, ainsi que sur les comportements à adopter en cas de crise grave, en réalisant « à minima » le dossier d’Information Communal sur les Risques Majeurs (DICRIM – décret 90- 918 modifié du 11 octobre 1990). Les comportements réflexes individuels constatés pendant les événements dans le Var vont à l’encontre du bon sens (aller récupérer sa voiture en zone inondée, aller chercher ses enfants à l’école, ne pas se mettre à l’abri…). Or, les DICRIM ont rarement été rédigés par les communes réglementairement concernées... c’est potentiellement 20 000 communes qui sont concernées en France par cette obligation.
Dans la pratique sur le terrain, notre Institut constate régulièrement que l’information du « public » sur les risques majeurs se trouve prise dans une série de contradictions notamment liées à ce devoir qu’ont les autorités responsables d’assurer « à sens unique – top/down» cette information préventive, souvent « standardisée » sans véritable campagne de communication récurrente, en direction des populations sans se préoccuper au préalable d’apprécier, dans leur démarche, ce qu‘il en est réellement du niveau de connaissance et de la perception collective locale des risques a priori. Une fois donnée, cette information est supposée organiser et déterminer les comportements individuels. De nombreuses enquêtes d’opinion réalisées ces dernières années, montrent le peu d’efficacité des actions d’information préventive quand elles sont mises en œuvre.
Au final, le droit des populations à l’information sur les risques (code de l’environnement – art.125 – 2 ) est principalement diligenté par l'Etat à sens unique en direction des maires qui n’ont pas conscience de leur responsabilité dans la répercussion de cette information auprès de leurs administrés. Aussi, le public nous apparaît aujourd’hui être le grand absent des politiques de prévention des risques, qui ne se mobilisera qu’occasionnellement soit, après une catastrophe en tant que « sinistré » ou soit encore, sur des positions « défensives » pour s’opposer à la dévalorisation des biens fonciers que « l’affichage réglementaire du risque » sur le territoire peut générer.
Selon notre Institut « l’information préventive devrait autant que possible s’appuyer sur les initiatives locales ». Il y aurait lieu de développer une logique de responsabilité et ouvrir le débat public, notamment par « l’information interactive », pour que chacun se sente concerné par la prévention :
« …
- Organiser la remontée d’information des citoyens vers les décideurs ; à cette fin, adapter les circuits de communication ; mettre en place des moyens d’écoute ; créer les conditions d’un dialogue entre les personnels des administrations et ceux des collectivités territoriales
- Adapter les systèmes de vigilance et d’alerte et de préparation aux aléas
- Sensibiliser la population par le canal des enfants (enseignements et exercices à l’école)
- Susciter la collaboration des médias hors période de crise et organiser la relation médias-experts et médias-décideurs les associant aux actions de prévention
- Mettre à disposition du public les archives des accidents du passé (mémoire du risque) et les analyses qui seront établies par retour d’expérience
- Inciter à un effort particulier d’informations municipales par des diffusions de bulletins
- Développer l’utilisation des technologies de l'information et de la communication… »
Protection des populations : Optimiser la vigilance météo au niveau très local et la prévision des crues quand c’est techniquement pertinent sur les petits bassins versants à caractère torrentiels comme ceux qui ont été touchés dans le Var – Généraliser les plans communaux de sauvegarde (PCS) quand le risque inondation ne peut être exclu
Depuis plusieurs années, notre Institut pointe du doigt la nécessité, pour les décideurs et responsables locaux, d'optimiser l'efficacité des modes de vigilance et d'alerte des populations pour faire face aux risques d’inondation à caractère torrentiel. Le Conseil Général de l'Environnement et du Développement durable (CGEDD) a publié en avril 2009 un rapport (voir lien ci-dessous - CGEDD 005487-01 de février 2009 relatif au ruissellement urbain et aux inondations soudaines) qui formule plusieurs recommandations sur les problématiques de ruissellement de versants qui ont occasionné également de nombreux dégâts dans le Var, notamment :
- une clarification des concepts
- un traitement des inondations soudaines distinct de la prévision des crues
- une chaîne courte de surveillance-information-alerte-gestion de crise
- l'adaptation de l'information produite par Météo-France et l'expérimentation du dispositif avec des collectivités aux caractéristiques diverses
- l'amélioration de la formation en hydro-météorologie
- la centralisation de la connaissance par le préfet de département.
Une condition d’amélioration évoquée ci-dessus serait selon nous, le raccourcissement de la chaine de la vigilance à l’alerte des populations (moins d’intermédiaires), particulièrement crucial pour les bassins versants inférieurs à 200 km2 où les temps de réaction des bassins (eau qui tombe et qui coule en se concentrant) sont courts, voire très courts. Il y aurait lieu ici pour les bassins versant les plus petits (c’est d’autant plus valable en secteur montagneux) d’optimiser les gains de temps en favorisant la mise en vigilance/alerte des autorités locales à partir de données relatives à la pluviométrie.
Le rapport d'octobre 2009 du CGEDD n° 007041-01 (cf lien ci dessous fihcier PDF) - mission sur les inondations à Sainte-Maxime les 18 et 19 septembre 2009 confirme que "... sur les inondations soudaines et le ruissellement urbain, les systèmes classiques de prévision et d'alerte des crues sont inadaptés aux bassins versants à crues très rapides....". La mission propose que "... soit très rapidement validé puis mis en oeuvre un circuit très court d'information des communes entre le constat de fortes pluviométries sur un bassin déterminé - constat fait par Météo France - et les responsables de l'action de terrain dans les communes réellement concernées par l'imminence d'une inondation liée à cet épisode pluvieux...".
Selon nous, l’alerte ne doit plus être considérée aujourd'hui comme la simple restitution « d’un signal » mais bien plutôt s’intégrer dans une chaine globale de traitement des données qui compose avec la vigilance, la prévision et la surveillance, l’alerte, la gestion de crise et le retour à la normale.
Ce traitement intégré suppose "...une coordination sans faille des niveaux de décision, notamment entre les municipalités et les services de l’Etat..." devant dépasser dans certains bassins versant l’approche technocratique standardisée édictée au niveau national. Cette coordination doit définir le rôle des acteurs à chaque échelle d’intervention : communes, bassin versant, département, interdépartemental. Ceci afin d’optimiser des processus d’information locaux qui devraient, le cas échéant, réduire les intermédiaires et privilégier la transmission des données « en mode poussé ».
Les événements du Var ont mis en exergue le manque de préparation des maires à faire face à de telle situation de crise : insuffisance dans l’anticipation des menaces existant sur leur territoire, difficulté d’appréciation de l’ampleur des vulnérabilités exposées en particulier humaines, compréhension incomplète de l’organisation des secours et de leur responsabilité, en particulier concernant les dispositifs d’alerte et d’information des populations. Depuis longtemps, les responsabilités du maire étaient définies dans ses pouvoirs de police générale, mais on ne lui disait pas comment se préparer à gérer la crise.
Pour remédier à cette situation, la loi n°2004–811 du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile est venue réaffirmer le rôle primordial de l’échelon communal dans la gestion d’une situation de crise, qu’elle soit d’origine naturelle ou technologique. En instituant à l’article 13 « le plan communal de sauvegarde (PCS) », elle a donné une base légale à des initiatives locales.
L’article 13 de la loi de modernisation de la sécurité civile précise que le PCS est obligatoire dans les communes « …dotées d’un plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvé ou comprise dans le champ d’application d’un plan particulier d’intervention… ». Au total, on peut estimer à ce jour que plus de 12 000 communes en France devraient réglementairement élaborer un PCS. Or, selon des sources de la Direction de la sécurité civile du Ministère en charge de l’Intérieur de juin 2010, environ 20 % des PCS réglementaires ont été réalisés depuis 2005 date de son décret d’application.
Pour notre Institut, il y a lieu de généraliser l'obligation d'établir des PCS dans toutes les communes où le risque inondation ne peut être exclu. Les communes devront se préoccuper dans l'élaboration de ces PCS au premier chef des questions d'information préventive et de mise en vigilance et d’alerte des populations .
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