Mémoire & retour d’expérience | Crue / Inondation
La prévention des risques naturels repose aujourd’hui très largement sur la capacité de tous les acteurs de la chaîne de prévention, depuis le responsable politique, administratif, technique, … jusqu’au citoyen, à s’informer et être tenu informé. Que ce soit pendant la crise, lorsque l’événement survient, ou, hors période de crise, dans la phase réservée aux actions préventives de toute nature.
Cette information, entendue au sens large, à la fois en terme de contenus, de formes, de procédures, constitue aujourd’hui pour qui veut l’embrasser une nébuleuse d’une grande complexité où s’entrecroisent de multiples registres de connaissances (administratifs, techniques, géographiques, humains, etc.), dans des contextes de production et de diffusion très variés, à des échelles territoriales et temporelles elles aussi variables.
Ce constat rend compte de la complexité même de l’objet traité, à savoir la prévention des catastrophes et la gestion des risques naturels sur un territoire.
Dans ces conditions, on a tous pu constater les limites des formes et supports traditionnels de l’information - en particulier du texte imprimé (livres, plaquettes et autres publications) - qui peinent, sur nos thématiques, à assurer leur fonction de partage et transmission de la connaissance.
Les médias audiovisuels, renforcés encore par les possibilités extraordinaires que le réseau Internet met à disposition, peuvent-ils offrir des alternatives concrètes et innovantes à cette situation ?
Plusieurs enjeux, propres à la prévention des risques naturels, nous semblent a priori pouvoir bénéficier à la fois des capacités techniques de cette interface et plus encore des acteurs et des métiers qui la constituent. La liste n’est pas exhaustive et chaque point évoqué soulève des questions multiples.
Le film, le reportage, permettent tout d’abord simplement de rendre compte d’un événement ou d’une série d’événements, de l’action d’un acteur, ou plus largement de la mise en œuvre d’une politique mais aussi, pourquoi pas, de l’état de vulnérabilité d’un territoire face à tel ou tel aléa naturel, etc. Les formes de restitution sont diverses. La réalisation (documentaire, reportage, voire fiction) reprend alors la fonction du récit en lui associant les vertus du montage de l’image animée et du son.
L’utilisation du film peut aussi, au-delà de l’information circonstanciée, servir à fixer ou à faire renaître la mémoire d’un événement, d’une situation, d’un lieu, etc.
L’enregistrement audio-visuel, sans qu’il y ait forcément et systématiquement montage d’un film, peut être mené pendant ou après des événements, sur des territoires à enjeux, de façon à constituer une banque d’images (rushes) qui pourra à loisir être utilisée ensuite pour la réalisation de montages adaptés à la demande. On soulignera ici tout l’intérêt de l’enregistrement audiovisuel direct de témoins d’événements, acteurs de la gestion de crise ou victimes.
Dans la même veine, le repérage et la collecte d’enregistrements anciens (films professionnels ou amateurs), dont certains remontent à l’origine du cinéma, complètent ce travail. On connaît tous les bandes d’images Pathé sur les inondations de 1910 à Paris. Il en existe de très nombreuses sur la thématique de l’aménagement du territoire et des risques naturels couvrant la période 1920-1970, conservés dans diverses institutions (INA, Pathé-Gaumont, etc.) ou dormant encore dans les greniers de particuliers.
Tout cela sollicite des compétences et des moyens spécifiques tant en ce qui concerne la réalisation ou la collecte, que la conservation et plus encore la diffusion.
Le très haut débit sur internet offre des perspectives pour le meilleur (cf. accès rapide et en continu à l’information) mais aussi pour le pire. On a vu récemment, à travers certains faits divers, l’impact que pouvait avoir la diffusion sur le web de vidéos amateurs. Compte tenu de la complexité des sujets couverts par le champ de la prévention des risques naturels, des questions de fond se posent sur les éléments d’appréciation qualitatifs – tous registres confondus - dont dispose réellement l’internaute. A-t-il vraiment les moyens d’avoir un recul critique ?
La conservation et la diffusion des réalisations audiovisuelles posent d’autres questions pratiques. Elles sont d’ordre technique par exemple. Tout simplement parce que les formats, les matériels, etc., évoluent très rapidement et demandent un investissement humain et financier régulier et important pour simplement permettre de lire le document, le transférer sur de nouveaux supports (cf. formats numériques). L’archivage et le traitement à grande échelle des images (repérage, extraction thématique des plans), font appel de leur côté à des techniques de pointe. Certaines relèvent de la recherche et sont difficiles à mobiliser sans un minimum de rapprochement de compétences et de mutualisation des moyens. On pourrait évoquer également les questions d’ordre juridique liées aux statuts des documents audiovisuels et à leurs ayants droit.
Quelles réalités concrètes donner à ces remarques ?
Tout d’abord, un certain nombre de choses existent déjà. Des films, des reportages sur la thématique des risques naturels ont été réalisés au cours de ces dernières années par de multiples acteurs à l’occasion d’événements ou dans le cadre d’actions de sensibilisation. L’IRMa est un de ces acteurs. D’autres interfaces audiovisuelles spécifiques sont disponibles. Le souci est plus alors aujourd’hui de savoir exactement ce qui existe, sous quelle forme, comment se les procurer. On comprend aisément que les contenus, les formes et longueurs doivent être adaptés en fonction des besoins ou des objectifs. Inventorier est donc l’un des premiers travaux à mener.
Mais parler de la catastrophe naturelle potentielle ou survenue sans forcément être catastrophiste demande de dépasser certaines formes habituelles de restitution des connaissances. Les journalistes, les réalisateurs audiovisuels ont une place plus importante à prendre aujourd’hui pour éclairer la complexité des informations, et assurer, en direction du public, la traduction du langage des scientifiques et des experts. Comment, aujourd’hui, assurer cette « traduction » à un échelon suffisamment proche des questions portées par les territoires et leurs habitants ?
Les actions et réalisations menées ces dernières années par la Cinémathèque d’images de montagne de Gap et l’historien Denis Cœur autour de la mémoire et de l’histoire des risques naturels donnent à voir des exemples concrets de ce qui peut être fait. Leurs films viennent d’être réédités.
Contact et commande du DVD : denis.coeur@orange.fr
Ou inscrivez vous
x Annuler