Mémoire & retour d’expérience | Crue / Inondation
En 1987, le torrent du Saint-Antoine n'en était pas à son coup d'essai. Ses crues étaient connues de longues dates et les archives du service RTM de la Savoie étaient là pour témoigner de ses débordements récurrents sur son cône de déjection : le pont de la route vers l'Italie est emporté 6 fois aux XVIII è et XIXè siècle. Le torrent inonde aussi des maisons en 1859 et 1866. La ligne de chemin de fer Paris-Rome, inaugurée en 1871 est quant à elle coupée 6 ans plus tard...
Le torrent de Saint-Antoine a, par la suite, su se faire un peu oublier. Assagi par les travaux de corrections torrentiels réalisés entre 1869 et 1915 dans le cadre de la politique RTM (Restauration des Terrains en Montagne), il ne connaît jusqu'aux années 1980 que quelques crues limitées (en 1905, 1906, 1922, 1943, 1955) qui comblent son chenal d'écoulement mais ne débordent pas. Le développement de la zone d'activité de Modane et de quelques habitations sur son cône de déjection s'est donc réalisé dans un contexte d'apaisement temporaire de l'activité du torrent. Plus de crue importante ne voulait cependant pas dire plus de danger, et deux études du service RTM réalisées avec le concours du Cemagref (aujourd'hui IRSTEA) au début des années 80 dressaient alors un sombre bilan de santé du bassin versant (érosion constante et ouvrages de correction torrentielle vieillissants malgré de nouveau travaux en 1952).
Le 24 août 1987, le Saint-Antoine se réveille donc. Suite à de violents orages, et dans un contexte de fonte des neiges tardive, le torrent entre en crue. Les coulées de laves torrentielles observées alors, déposent environ 80 000 m3 de boue sur son cône de déjection. Le pont de la RN6 est obstrué par des gros blocs et le torrent se déverse sur Modane-Ville. Le pont de la zone d'activité est lui aussi obstrué et les débordements généralisés dans cette zone. La crue n'a duré que 30 mn environ (de 12h00 à 12h30) mais a causé d'importants dommages : 16 bâtiments du quartier de la zone industrielle sont détruits ou gravement endommagés, 7 rez de chaussée et caves inondés, 75 garages et caves touchés, 52 véhicules détruits ou gravement endommagés (source RTM 73).
27 ans après, la crue du 1er août 2014 semble identique en tout point en regardant les images qui circulent dans les médias. Si elle a duré à peu près le même temps (environ 30 mn entre 20h00 et 20h30), elle est cependant moins importante puisque son volume a été estimé entre 40 000 et 60 000 m3. La période de retour approximative de cet évènement est donc de l’ordre de 30 à 50 ans, selon le service RTM de la Savoie. Celle de 1987, d'un volume de 80 000 m3 environ, avait une période de retour plus rare, de l'ordre de 100 ans.
L'autre différence entre ces deux laves est relative à la construction d'une plage de dépôt, en 1991, en amont du cône de déjection. D'une capacité de 16 000 m3, cette plage de dépôt a permis, le 1er août 2014, l'arrêt de très gros blocs qui auraient probablement obstrué le pont de la route départementale 1006 plus en aval. Elle a donc contribué à éviter une inondation de Modane-ville comme cela s'était produit en 1987.
Si le volume des deux laves et leurs conséquences sont différentes, les conditions météorologiques à l'origine de leur déclenchement semblent en revanche très proches l'une de l'autre. En 1987 comme en 2014, les sols étaient saturés en eau avant l'orage déclencheur qui lui même n'était pas exceptionnel. Selon les rapports du service RTM de la Savoie :
Le 1er août 2014 à 06h00, le département de la Savoie était en vigilance verte. A 16h00 il était en vigilance jaune. L'orage a débuté vers 18h00 et la crue s'est produite entre 20h00 et 20h30. Etant donné la difficulté à prévoir ces crues localisées en montagne (le 1er août des habitants bloqués dans leur maison cernée par la boue ont été hélitreuillés), les seules solutions de prévention pérennes consistent soit à ne pas construire en zone inondable, soit à réaliser des travaux de protection appropriés mais coûteux. La commune de Modane a aujourd'hui en projet l'amélioration de la plage de dépôt du Saint-Antoine pour porter sa capacité à 80 000 m3.
Sources :
- Rapport du service RTM de la Savoie du 01/08/2014
- Modane, le torrent du Saint-Antoine - Brochure d'information réalisée par le service RTM 73
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